06 Jan Si la Fête des rois m’était contée…
En ce jour d’Epiphanie, rapprochons-nous du Papet et de son gari pour écouter un peu ce qu’ils se disent sur la Fête des Rois, sans qu’ils nous voient. Chut !
– Dis Papet, raconte encore quand tu étais petit !
– Tu vois mon gari, le temps se rafraîchit considérablement. Eh bien, c’est le temps de Noël, la crèche, les santons, le sapin… ça ne s’arrête pas, une sarabande de fêtes à faire crever l’hiver, tiens ! Et puis, les Rois !
– Les Rois, mon Papet ! Quels Rois ? Les vrais ?
– Des vrais et des pas vrais, mais écoute bien… c’est un secret…
Tu te souviens, l’année dernière ? Tu étais encore bien petit, ta mère a posé un jour sur la table un gros gâteau rond, avec une couronne dessus !
– Oh oui, Papet. Je me suis mis sous la table et j’ai dit pour qui étaient les morceaux. C’est ça, Papet ?
– C’est ça, mon Pitchounet ! Même que tu as tiré la fève et que tu as été le Roi toute la soirée avec la couronne sur la tête.
Une fête ancienne de 3 000 ans
Cette fête, tu sais, c’est très, très vieux ! On la célèbre en Italie, en Espagne, en Grèce, au Québec,… ça a commencé il y a 3 000 ans au moins ! Il y a donc 3 000 ans de ça, en Grèce, en Egypte, on offrait du pain pour fêter la fin de l’année. Et même, on couronnait un faux roi, un Roi de Carnaval, pour se moquer du vrai Roi… Et les gens buvaient beaucoup !
– Et après, Papet ?
– Après, du temps des Romains, au début de l’année, on fêtait le Dieu de l’époque, Saturne, avec un grand repas, un banquet. Et les esclaves devenaient les maîtres d’un jour et les vrais maîtres les servaient. Le monde à l’envers ! ça durait une semaine. Puis on tirait un roi au sort avec des dés, on se faisait cadeau des gâteaux. Mais un jour, des soldats ont battu à mort le faux Roi. Ils ont été punis et …
– Il n’avait rien fait le faux Roi, Papet ?
– Non, rien de mal ! Plus tard, les premiers chrétiens ont mélangé cette fête à d’autres fêtes de la fin de l’année… et on dansait. Même les prêtres dansaient et buvaient. Comme ils exagéraient, le Pape a dit « ça suffit ! » On a finalement déplacé cette fête au 6 janvier, l’Epiphanie. Ce jour-là, on distribuait des petits pains avec des formes humaines – des marmousets -, du blé, du poisson… et on faisait des grands feux pour éclairer la nuit de l’hiver et ça représentait la vie.
Depuis, tu vois, on fête le Roi de la Fève, le Roi des Fous, et même en Allemagne, un Empereur de la Fève.
– Papet, pourquoi une fève dans le gâteau ?
– Parce que c’est un plat de pauvres. Les riches mettaient une pièce d’or à la place. ça se fait toujours d’ailleurs en Crète ! Le pain est devenue une brioche, plus riche, mais toujours la fève désignait le Roi du festin.
Une fois, François Ier, un vrai Roi, vexé de n’avoir pas trouvé la fève dans son morceau a déclenché, à Besançon, une bataille d’œufs et de boules de neige.
Les boulangers ont voulu supprimer la fête parce qu’ils devaient offrir des gâteaux des rois au public. Après, c’est la Révolution qui voulait éliminer tous les Rois, même les faux. Rien à faire, les gens continuaient à manger le gâteau des Rois en criant » Le Roi boit, le Roi boit ! « . Alors tout est revenu comme avant, en plus important même !
– Tant mieux Papet, j’aime ça les Rois. Et les Rois Mages ?
Les Rois Mages ? Des magiciens venus voir l’Enfant Jésus
– Les Rois Mages ? C’étaient des magiciens. Ils étaient allés voir le petit Jésus né le jour de Noël, dans sa crèche de paille. Balthazar, Gaspard et Melchior. Ils représentaient l’Europe, l’Asie et l’Afrique. Après, on a dit que c’étaient des rois, des rois-mages, venus avec des cadeaux pour honorer l’enfant nouveau-né, leur Roi. Et les feux allumés partout, c’était pour éclairer leur chemin et faire fuir les brigands. Et partout après, on faisait des feux pour la chaleur, pour la lumière qui raccourcit la nuit et chasse les maladies. Les Rois de France voulaient allumer eux-mêmes ces feux de joie, même Louis XIV. Et on était heureux, surtout après avoir mangé le bon gâteau, la couronne ou la galette, et qu’on avait gardé une part pour le pauvre ou pour l’absent. Et c’était toujours l’enfant qui disait les parts, qui avait l’autorité et les autres obéissaient…
– Comme à moi ! Et le petit sujet, Papet ?
– Ah le sujet en plâtre ou en porcelaine ! Tu sais, celui qui trouvait la fève devait offrir un gâteau le dimanche suivant. Alors les avares avalaient la fève. Alors on a mis à la place un gros sujet, et pour l’avaler celui-là…
– Bien fait ! Maintenant, on met les deux.
– Après, le Roi choisissait sa Reine (ou la Reine son Roi) et on buvait avec eux pour fêter leur couronnement. ça continue encore maintenant !
Et on dansait aussi. On le fait encore, on fait la ronde, ronde comme la couronne, la galette, le soleil, le monde…
– Papet, tu me fais tourner trop vite !
– C’est que tu as sommeil. Allez bonne nuit, mon petit Roi !
Merci à Jean-Pierre Générosi, professeur à la retraite, trésorier de l’association Des Saveurs et des Mots, pour ses recherches. Crédit photo : Caroline Générosi03
Jean-Pierre Générosi lors de sa conférence sur la galette des Rois au Musée de Marignane
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